Une conférence au CESE met en lumière le potentiel inexploité de la bioéconomie pour la transition vers une Europe plus durable

Un an après que la Commission européenne a lancé sa stratégie européenne actualisée pour la bioéconomie, le Comité économique et social européen (CESE) a organisé avec elle et le Comité européen des régions (CdR), le 16 octobre 2019 à Bruxelles, une manifestation sur le thème de la Bioéconomie européenne: régions, villes et société civile.

La manifestation a été ouverte par Maurizio Reale, président de la section NAT du CESE, Jácint Horváth, rapporteur de l’avis du Comité des régions sur la bioéconomie, et Wolfgang Burtscher, directeur général adjoint de la direction générale Recherche et innovation (RTD) de la Commission.

Dans son allocution de bienvenue, M. Reale a souligné l’importance que revêt la bioéconomie pour la réalisation des objectifs de développement durable. Il a également mis l’accent sur le rôle crucial des agriculteurs européens dans la gestion durable de nos ressources naturelles.

Animée par Andreas Thurner, membre du CESE, la table ronde d’ouverture a débattu des stratégies en matière de bioéconomie qui sont développées au niveau tant régional que national, ainsi que sur la contribution qu’y apporte la société civile.

Les représentants locaux et régionaux ont souligné, lors de leurs interventions, l’énorme potentiel que la bioéconomie recèle pour le développement économique, en particulier dans les zones rurales où elle contribue considérablement à enrayer l’exode rural. Les régions doivent disposer des ressources nécessaires pour pouvoir tirer profit de la possibilité de développer leur propre secteur bioéconomique. Il conviendrait aussi de lancer des projets transfrontaliers en la matière.

La stratégie bioéconomique de l’Irlande est fondée sur une triple approche: il s’agit tout d’abord de tirer parti du potentiel de la bioéconomie pour répondre aux impératifs de la durabilité et de la circularité, d’élaborer ensuite des actions spécifiques et de relever les principaux défis qui se posent pour en améliorer la réussite commerciale et le déploiement social et, enfin, de dessiner un cadre d’action. Patrick Barrett, du ministère irlandais de l’agriculture, de l’alimentation et des affaires maritimes, a présenté le cas de l’Irlande et souligné le rôle fondamental que le partenariat européen d’innovation joue pour assurer la cohérence des politiques. Pour élaborer leurs stratégies nationales en matière de bioéconomie, les autres États membres pourraient s’inspirer de l’exemple irlandais, qui contribuerait ainsi à construire une Europe durable de façon plus efficace.

Le Réseau européen de la bioéconomie (European Bio-economy Network, EuBioNet) est une alliance à caractère prospectif, fédérant des projets, financés par l’Union européenne, qui visent à promouvoir, faire connaître et soutenir la bioéconomie. L’objectif principal du Réseau de la bioéconomie est de sensibiliser, de maximiser les efforts, d’accroître le partage des connaissances, la mise en réseau et l’apprentissage mutuel et de faciliter la coordination d’activités et de manifestations communes, a expliqué Susanna Albertini, de ce réseau EuBioNet. Pour atteindre ces objectifs, EuBioNet organise des activités de mobilisation et d’apprentissage mutuel. Les gens doivent trouver une inspiration qui les pousse à développer leurs propres idées.

Lors de la session axée sur l’éducation et la formation, Mindaugas Maciulevičius, membre du CESE, a exhorté l’assistance à former de nouvelles Greta, des enfants sensibilisés au devenir de notre planète!.  La durabilité est fondamentale pour une bioéconomie européenne opérante et, pour l’encourager, il importe de s’appuyer sur l’éducation et le soutien à la recherche et à l’innovation.

Pour Iris Lewandowski, professeure à l’université de Hohenheim, notre mission est d’aider la bioéconomie européenne fondée sur la connaissance à s’émanciper, en instruisant une nouvelle génération d’experts européens. L’université de Hohenheim fait partie d’une alliance de six États membres européens qui vise à bâtir un réseau dynamique et une plate-forme créative d’envergure européenne pour développer, promouvoir et mettre en œuvre la bioéconomie dans toute l’Europe. Ensemble, a-t-elle déclaré, nous pouvons créer une institution intellectuelle de pointe en Europe pour relever les énormes défis environnementaux et sociétaux du 21e siècle.

Du point de vue de l’industrie, l’augmentation de la demande de main-d’œuvre qualifiée représente l’un des goulets d’étranglement qui peuvent se créer. Précurseure en matière de durabilité dans le secteur forestier, la société Metsä Fibre offre une expertise dans le domaine du commerce du bois et de la gestion des forêts, de la production industrielle chimique et mécanique, de l’entretien et des technologies de transformation du bois. Nous changeons et évoluons en permanence, en recourant aux technologies les plus récentes. En conséquence, les compétences dont nous avons besoin ne cessent de s’étendre, de sorte que la formation et l’éducation sont devenues des paramètres fondamentaux lorsque nous recrutons de nouveaux salariés, a expliqué Lasse Brandt, vice-président de Metsä Fibre pour les ressources humaines.

Les travailleurs et les syndicats considèrent que la bioéconomie possède un énorme potentiel pour créer de l’emploi en zone rurale, en particulier dans le secteur agricole et halieutique. La bioéconomie est intéressante pour nous, car elle est porteuse de croissance dans l’agriculture et l’industrie, d’innovation dans différents secteurs, de nouveaux types d’emplois et d’éducation, a conclu Jesper Lund Larsen, de la Fédération européenne des syndicats de l’alimentation, de l’agriculture et du tourisme.

Membre du CESE, Simo Tiainen a été le modérateur de la session consacrée à La bioéconomie bleue en Europe, à laquelle ont pris part Anthony Buchanan, membre du CdR et du conseil de l’East Renfrewshire, en Écosse, Felix Leinemann, chef de l’unité Secteurs de l’économie bleue, aquaculture et planification de l’espace maritime de la de la direction générale des affaires maritimes et de la pêche (MARE), et Jyrki Suominen, chef adjoint de l’unité Santé des océans et des mers de la direction générale Recherche et développement (RTD), l’un et l’autre de la Commission européenne, et, enfin Antidia Citores, responsable des affaires juridiques, des campagnes et de l’action d’influence de la Surfrider Foundation Europe.

L’Écosse œuvre intensément au développement de son secteur de la bioéconomie bleue dans les zones côtières, en particulier pour ce qui concerne des domaines comme l’énergie éolienne et la pêche.

La Commission européenne est pleinement consciente du potentiel considérable de la bioéconomie. Le Forum de la bioéconomie bleue, qui a été créé à son initiative et rassemble des représentants du secteur, des pouvoirs publics, du monde universitaire et de la finance, a organisé des échanges sur les principaux défis et formulé des recommandations à l’attention de la nouvelle Commission. La lettre de mission de Virginijus Sinkevičius, commissaire désigné à l’environnement et aux océans, mentionne l’élaboration d’une nouvelle stratégie pour l’économie bleue. Dans ce contexte, les investissements dans la recherche et l’innovation seront essentiels pour mettre au point des solutions de substitution aux ressources fossiles qui seront biosourcées, recyclables et biodégradables dans le milieu marin.

La table ronde de clôture, animée par Andres Thurner, membre du CESE, s’est quant à elle penchée sur le thème de la bioéconomie dans le cadre de la Journée mondiale de l’alimentation. La croissance de la population mondiale entraînera une augmentation de la demande alimentaire, et l’accroissement de la richesse économique aggravera encore la situation.

L’alimentation est au cœur de la bioéconomie, a déclaré Andrea Vettori, chef adjoint de l’unité Utilisation et gestion des terres de la direction générale Environnement de la Commission européenne. S’agissant de lutter contre les pertes de biodiversité et de réagir au défi climatique, il a plaidé en faveur de politiques qui soient axées sur le long terme et cohérentes. L’innovation systématique, qui a occupé le centre du débat, doit être à la fois technologique et sociale. Nous sommes en train de passer d’un monde de petite taille sur une grosse planète à un monde de grande taille sur une petite planète, a-t-il déclaré, avant de conclure: C’est au niveau local que le changement doit s’opérer, et il s’impose que les citoyens deviennent devenir des partenaires essentiels de ce processus.

Après cet appel à l’action, Galin Gentchev, responsable de la bioénergie et de la bioéconomie agricoles à la direction générale Agriculture de la Commission européenne, a souligné que le véritable défi mondial est de savoir comment répondre à la demande croissante de denrées alimentaires d’une manière qui soit durable du point de vue de l’environnement. Les niveaux régional et local sont essentiels dans ce processus, et le rôle de la PAC sera d’aider le secteur agricole à s’adapter à l’évolution de la demande, tout en laissant aux producteurs une certaine souplesse quant à ce qu’ils entendent produire.

Toutes les régions sont des biorégions en puissance, a affirmé Alin Adrian Nica, premier vice-président de la commission SEDEC du Comité des régions, qui a expliqué que le thème de la bioéconomie revêt une nature transversale, embrassant plusieurs secteurs différents. Pour atteindre nos objectifs, il nous faut adopter des approches horizontales et coopérer avec les acteurs à l’échelon local. Les États membres et l’Union européenne devraient endosser un rôle de facilitateurs, afin que la bioéconomie prospère au niveau régional. Rendre l’agriculture durable ne veut pas dire qu’il faille tourner le dos à l’innovation technologique: les technologies de précision ou de surveillance des sols, pour ne prendre que deux exemples parmi bien d’autres, peuvent constituer des atouts majeurs pour la transition vers la durabilité agricole.

Dans son discours de clôture, Peter Schmidt, membre du CESE, a rappelé aux participants le fil rouge qui a parcouru toute la manifestation: l’idée qu’un changement fondamental et systématique doit se produire dans le secteur agricole. Les données montrent que la faim a augmenté dans le monde. Les institutions européennes ont beaucoup travaillé sur la question et la société civile organisée doit jouer son rôle dans la mise en œuvre des idées qui sont déjà sur la table. L’occasion d’agir est là. Nous avons tous les outils, nous devons y aller, a-t-il conclu.