Les acteurs économiques et sociaux débattent de l’avenir du partenariat UE-Afrique au lendemain de la pandémie

Le 2 mars, le Comité économique et social européen (CESE) a accueilli la 7e réunion des représentants des acteurs économiques et sociaux Afrique-UE, une manifestation virtuelle au cours de laquelle les orateurs ont débattu de l’avenir du partenariat UE-Afrique, en mettant particulièrement l’accent sur la lutte contre la pandémie de COVID-19 et ses conséquences.

L’objectif principal de la réunion était de préparer une déclaration politique qui sera transmise au prochain sommet des chefs d’État de l’Union africaine et de l’UE qui aura lieu au cours du second semestre de l’année 2021, afin de nourrir le débat en contribuant à l’avis de la société civile organisée. Cette manifestation, qui avait pour titre spécifique «Les infrastructures au cœur de la stratégie globale Afrique-UE», a principalement porté sur la coopération dans la lutte contre la pandémie de COVID-19.

Des représentants de la société civile organisée de l’UE et d’Afrique ont assisté à la réunion pour débattre des défis à venir. La première table ronde a été consacrée à la reprise au lendemain de la pandémie, en tant que nouvelle priorité du partenariat.

Les effets de la COVID-19 en Afrique

Denise A. O. Kodhe, responsable du Conseil économique, social et culturel de l’Union africaine, a mis l’accent sur les conséquences sociales de la pandémie: La principale inquiétude que m’inspire la pandémie de COVID-19 ne concerne pas ses effets économiques, mais son impact sur les citoyens; les gens sont bouleversés et la situation les affectera sur le long terme. En Afrique, les traditions sont très importantes, et en raison du contexte, les rassemblements ne sont plus possibles. M. Kodhe a également souligné le rôle de la société civile organisée: Nous ne nous sommes pas les ennemis des gouvernements; notre rôle est complémentaire au leur, et ils doivent le comprendre.

S’exprimant au nom de la Commission européenne, Gabriella Fesus, cheffe de l’unité Inclusion sociale et protection, santé et démographie de la direction générale des partenariats internationaux, a insisté sur la nécessité de penser à long terme: Cette pandémie a révélé que nous devons renforcer la prévention ainsi que les systèmes de santé. Nous devons soutenir la fabrication locale de médicaments et d’équipements médicaux en Afrique. Et il s’agit bien sûr d’un projet à long terme.

Matshidiso Moeti, directeur régional pour l’Afrique de l’Organisation mondiale de la santé, a déclaré que la pandémie de COVID-19 a eu des conséquences dramatiques en Afrique, où elle a engendré la première récession économique depuis les 25 dernières années. La relance nécessitera des années d’efforts communs; nous devons appliquer les leçons que nous avons tirées de la situation afin de renforcer la résilience des pays et des sociétés d’Afrique. Ensemble, nous devons œuvrer au renforcement des capacités locales à long terme, a déclaré M. Moeti, qui a également souligné que la pandémie avait aussi eu des effets positifs en termes d’amélioration des infrastructures.

Deux représentants de Médecins sans Frontières, Inma Vázquez et Salha Issoufou, ont décrit les initiatives en cours de cette ONG en Afrique et la manière dont la pandémie a affecté leur travail. Le renforcement des systèmes de santé en Afrique est essentiel, a déclaré Mme Vázquez, qui a également reconnu le travail des institutions de l’UE tout en les invitant à tenir compte de la nécessité de fournir des vaccins à certains groupes spécifiques et pemettre une dérogation temporaire aux droits de propriété intellectuelle sur les vaccins.

Pacte vert et développement durable

La deuxième partie du débat a porté sur le défi commun de la transition verte, qui constitue l’un des principaux aspects stratégiques du partenariat UE-Afrique. Bernardo Ivo Cruz, conseiller pour la coopération en Afrique auprès de la présidence portugaise du Conseil de l’Union européenne, a déclaré: Nous ne pouvons plus nous appuyer sur les mêmes modèles qu’auparavant. Nous devons bâtir un partenariat renouvelé, à partir de nos inspirations communes, qui intègre les objectifs de développement (ODD) énoncés par les Nations unies. M. Cruz a annoncé que la présidence portugaise tiendra une réunion à Lisbonne les 22 et 23 avril avec l’ensemble les acteurs concernés, dont le président du comité de suivi ACP-UE, afin de débattre de ces sujets.

Jocelyne Landry Tsonang, représentante du Réseau africain de l’économie circulaire, a mentionné certains des défis auxquels sont confrontés les pays africains, tels que la mauvaise gouvernance, la corruption, les pénuries d’approvisionnement ou le changement climatique, tout en insistant sur le fait que l’économie circulaire peut être un instrument utile pour atteindre les ODD. Anaïs Amazit a présenté le pôle de coopération de la jeunesse Union africaine - UE, un réseau de jeunes originaires des deux continents dont l’objectif est de rechercher de nouvelles approches dans le partenariat entre l’UE et l’UA et de suivre les politiques liées à la jeunesse, telles que l’éducation, la création d’emplois ou la numérisation. Un exemple de coopération a été donné par René Mono, fondateur de Solaris Offgrid, une initiative visant à fournir de l’électricité aux régions isolées d’Afrique grâce à l’énergie solaire.

Zone de libre-échange continentale africaine

La troisième table ronde a porté sur la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), une initiative de l’Union africaine visant à accélérer le commerce intra-africain et à renforcer la position commerciale de l’Afrique sur le marché mondial en consolidant la voix et l’espace politique communs de l’Afrique dans les négociations commerciales mondiales.

Ewa Synowiec, directrice chargée du développement durable et des accords de partenariat européens au sein de la direction générale du commerce de la Commission européenne, a évalué le soutien qu’apportent les institutions européennes et les États membres de l’UE à la mise en œuvre de la ZLECAf: L’UE doit renforcer son engagement en Afrique, car les deux continents partagent de nombreux liens économiques et culturels.

Du côté africain, Anselme Amoussou, secrétaire général de la Confédération des syndicats autonomes du Bénin (CSA-Bénin) et membre du Conseil économique et social du Bénin, a évoqué la nécessité de créer des mécanismes inclusifs pour la mise en œuvre de la ZLECAf, même si jusqu’à présent, les acteurs sociaux n’y participent guère. Amadou Sako, conseiller externe pour l’Afrique au sein de l’Organisation internationale des employeurs, a exposé les avantages de la ZLECAf, tels que la baisse des prix pour les consommateurs, l’amélioration de la compétitivité ou la création d’emplois, et a insisté sur la nécessité de «tirer le meilleur parti» de cette zone de libre-échange. Un exemple a été présenté par Bayla Sow, membre du syndicat de l’aviation civile du Sénégal, qui a décrit les problèmes spécifiques du trafic aérien en Afrique et la manière dont la ZLECAf ouvre de nouvelles perspectives pour le secteur sur le continent.

En guise de conclusion, Carlos Trindad, président du comité de suivi ACP-UE du CESE, a remercié les intervenants pour leur contribution et a déclaré: De nombreux progrès ont été accomplis, mais il en reste encore beaucoup à faire, soulignant la nécessité de lutter contre les inégalités en Afrique.